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Consolidated PBY "Catalina"

Type : PBY-5A /Canso A, modèle  : 28-5ACF
Immatriculation : N9767  
Numéro constructeur : 21996 
Identité militaire : RCAF9767
PW R-1830 2 x Pratt & Withney  R1830-92S
PBY Catalina face, profil, dessus 300 ppi Catalina 01
                                                                  Harald Ludwig                                                             plus de photos
Le plus rapide des bateaux et du plus lent des avions :
Le Catalina 9767 – Princesse des Etoiles –

Chasseur de sous-marins, bombardier d’eau, avion de reconnaissance, de transport public, régie de télévision pour TF1 sur l’Opération Okavango… ce Catalina à quasiment connu toutes les missions pour lesquelles il a été imaginé, puis adapté. Des presque 4 000 exemplaires produits, il n’en reste qu’une petite quinzaine aujourd’hui en état de vol. Et celui-ci s’avère certainement le plus mythique et le plus représentatif de tous.

Celui qui va devenir « 9767 », au sein de la Royal Canadian Air Force, est né de père américain et de mère canadienne. Quand Boeing s’installe sur Sea Island, au sud de Vancouver, en 1942, pour lancer la fabrication sous licence du déjà célèbre Catalina, Consolidated expédie de San Diego toutes les pièces et équipements nécessaires aux 55 premiers exemplaires… Pièces américaines, ouvrières canadiennes… de tous les amphibies qui sortiront de Sea Island, « 9767 » est le seul survivant en état de vol au monde et le dernier des Boeing marins !

La légende de N9767 commence lorsqu’il est livré à la Royal Canadian Air Force en qualité de Canso A, numéro de série 9767. Il est alors affecté à Reykjavík au 162 (BR) Squadron, (avion « S » for Sugar). Le 17 avril 1944, lors d’un vol de reconnaissance météorologique, le F/O T.C. Cooke attaque l’U-Boot U-342 en surface, au sud-ouest de l’Islande. Cet U-Boot, commandé par l’Oblt. Albert Hossenfelder, effectuait sa première croisière opérationnelle, ayant quitté son port d’attache de Bergen deux semaines auparavant. Le sous-marin et son équipage, composé de 54 marins, ne revirent jamais leur patrie…

Presqu’un an après la victoire en Europe, en avril 1946, « 9767 » est acquis par Canadian Pacific Airlines et immatriculé CF-CRR. Au cours de ces quatorze ans de service au sein de la compagnie aérienne, l’appareil est employé pour le transport de passagers et de fret, sous les numéros de flotte « 233 », puis « 933 ». C’est à cette époque qu’il perd définitivement tous ses accessoires militaires, son nez tronqué, son armement et ses couleurs de camouflage, au profit d’une livrée rouge, bleu et argent

CF-CRR Canadian Pacific Airlines 3

Juste avant que Canadian Pacific Airlines cesse d’exploiter l’appareil, « CRR » est victime de dommages substantiels au cours d’un amerrissage par vent de travers à Terrace, en Colombie Britannique. Le Canso doit se dérouter sur l’aéroport le plus proche avant d’y effectuer un atterrissage « train rentré ».

De nouvelles compagnies aériennes canadiennes prennent le relais de CPAL et exploitent « CRR », telles que Northland Airlines, Midwest Airlines et Ilford Riverton Airways, avant qu’il ne devienne la propriété d’Avalon Aviation pour être transformé en bombardier d’eau.

En tant que pompier volant, le Canso arbore sur sa coque le numéro « 1 » et par la suite « 791 ». Au cours de ses missions de lutte anti-feu, « CRR » est victime d’incidents, malheureusement classiques dans ce métier à hauts risques, dont deux particulièrement notables. Le premier arrive à Sylvan Lake dans l’Alberta, le 27 mai 1978. Des dommages sérieux sont constatés sur l’appareil après un amerrissage brutal au cours d’un entrainement à l’écopage. L’appareil est ramené vers la rive à temps. L’extrémité de l’aile droite, brisée au cours de l’accident, est finalement remplacée par une autre provenant des stocks issus de la seconde guerre mondiale… cette aile portait encore les cocardes de la RCAF !

Le deuxième accident, le plus spectaculaire, se produisit le 30 mai 1981, lorsque la trappe gauche du train avant s’ouvrit intempestivement durant un écopage sur Complex lake, dans les Territoires du Nord-Ouest. L’appareil se dresse alors sur le nez avant de couler, ne laissant émerger que l’aile gauche et le haut de la dérive ! « CRR » est renfloué, réparé dans des conditions inimaginables, avant de reprendre l’air depuis la surface du lac !

Au total, des moments plutôt mouvementés… et un « karma » plutôt chanceux. A chaque fois, il s'est relevé, à chaque épreuve, il est reparti comptabilisant  une à une les neufs vies, couramment attribuées aux… Cat !

Initialement basé à Red Deer dans l’Alberta, « CRR » déménage à Parry Sound dans l’Ontario en 1977… ou il est finalement stocké lorsqu’Avalon cesse ses activités vers la fin des années 1980. Au cours de son stockage à Parry Sound, différentes tentatives d’achat sont initiées par des groupes de passionnés canadiens, dans le but de préserver l’appareil historique. Toutefois, chacune d’entre-elles échouent et au cours de l’hiver 1994, c’est Canadian Air Legend de Franklin Devaux, basée à Dijon, qui devient le récipiendaire de l’appareil. Au printemps 1995, C-FCRR quitte sa terre natale, le Canada, pour la France.

Une fois arrivé, l’hydravion est entièrement révisé à Dinard par « LAB » (désormais Sabena Technics). Ses blisters sont replacés par Tom Reilly de Kissimmee, en Floride et une partie des travaux de maintenance sont effectués par Mark Edwards sous l’œil d’ingénieurs canadiens. L’avion est certifié « transport public » selon les exigences de l’aviation civile canadienne… faisant de lui le seul Catalina au monde exploité sous ce régime de vol ! A Toulouse l’appareil est repeint par l’Aerospatiale dans des tons gris et bleu en vue de sa nouvelle vie, sa future mission.

Okavango 5 

En octobre 1995, le Catalina devient la régie volante et l’appareil d’exploration de la série télévisée française « Opération Okavango » en Afrique, avec Nicolas Hulot. Sa mission l’emmene à Djibouti, aux Comores, au Kenya et en Ethiopie.  En un an et demi d’exploitation, dans les pires conditions de sa carrière, l’hydravion n’a souffert d’aucun dommage ! Excepté la rupture d’un cylindre qui, sur une saute d’humeur toujours énigmatique, décide de déserter… résultat : quelques heures de travail entre deux vols et autant de repos pour l’équipage !

Après quelques semaines à Harare au Zimbabwe, C-FCRR reprend le chemin de la France et au milieu de l’année 1997, l’explorateur se retrouve à Arcachon, sans ses décorations « Okavango ». Portant à cette époque le nom de « Capitaine Tom Cooke » (en l’honneur de son illustre commandant de bord qui coula l’U-342), l’hydravion est finalement repeint aux couleurs d’Air France…

Place de la Concorde before the flight

Rebaptisé quelques temps plus tard « Princesse des Etoiles », il vole jusqu’au Bourget le 23 août 1998. L’hydravion y est démonté par Mark Edwards, qui avait précédemment suivit sur le tournage d’« Opération Okavango », avant d’être emporté sur trois camions jusqu’à la place de la Concorde, en bas des Champs Elysées. L’appareil y est exposé au public, avec d’autres avions historiques, pour célébrer le centenaire de l’Aéroclub de France.

Ramené au Bourget, remonté, recertifié, l’hydravion décolle en direction du sud pour sa nouvelle aventure : un vol transatlantique ralliant le Chili, l’Argentine et le Brésil via l’Afrique de l’Ouest ! Ce vol mémorable est destiné à commémorer l’Aéropostale et les vols courrier effectués par Jean Mermoz dans les années 1930. Le Catalina quitte Toulouse-Montaudran le 14 octobre. Et le 28 novembre 1998, C-FCRR arrive à Santiago du Chili. De retour au Brésil pour quelques mois de repos, la « Princesse des Etoiles » met finalement cap au nord et passe quelques temps à Oshawa en Ontario, ou une séquence de maintenance est effectuée par les techniciens d’Enterprise Air, compagnie exploitant l’hydravion.

Toulouse-Santiago 12

La Princesse quitte une nouvelle fois le Canada le 8 juin 1999, traversant l’Atlantique via Reykjavik et Shannon, avant de retrouver Dinard en Bretagne, puis le Salon du Bourget. Quelques semaines plus tard, l’hydravion est utilisé comme plate-forme volante pour filmer l’éclipse solaire totale du 11 août…

L’ombre ne se lève qu’aujourd’hui sur la « Princesse des Etoiles », L’appareil est basé à l’aéroport d’Orly au sud de Paris depuis quelques temps quand Mark Edwards, d’AirVenture Ltd, effectue la dernière séquence de maintenance et sa préparation en vue de l’obtention de sa certification américaine. Le Canso abandonne alors son immatriculation canadienne historique, C-FCRR, pour une américaine « N9767 », prélude à sa résurrection... Et le 22 décembre 2010, bénéficient d’une acalmie météorologique providentielle, la Princesse décolle…

Avant que l’appareil ne s’envole pour Melun-Villaroche, il fut entièrement révisé par des mécaniciens canadiens, américains et français (Jim VanDyk, Peter Houghton, George Perez et Patrice Sublemontier), aidés par des bénévoles d’Air France Industries. « 9767 » reçoit un nouveau moteur, de nouvelles hélices, une nouvelle avionique, de nouveaux câbles de commande, de nouveaux systèmes hydraulique et carburant, sans parler du reste… Presque toutes les pièces composant la Princesse sont contrôlées et remplacées lorsque c’est nécessaire. Le résultat de ce travail est un véritable témoignage à la gloire de ces mécaniciens.

Aujourd’hui l’exploitation de l’hydravion de légende est réalisée par les bénévoles de FFW et la SNC SDPA.

La « Princesse des Etoiles » a enfin retrouvé les seuls éléments sur terre qui lui conviennent : le ciel et l’eau !

N9767 in flight by Yves Cartilier


 

The "Cat" seen by our Swiss friends "Altitudes Pictures"

catalina 20

 

J'ai piloté le "Cat"
 
150 YvesCatalinaYves CARTILIER raconte:

"Sur terre :

La première chose qui frappe quand on approche le Catalina est sa taille. Son envergure est comparable à celle d’un avion de ligne moderne. Il est heureusement beaucoup plus léger qu’un Airbus, mais ses 12 tonnes au décollage le font définitivement rentrer dans la catégorie des "gros" avions de collection. La visite pré-vol inclue donc des détails pittoresques comme le décompte des bouchons de coque, ou l’escalade le long du train principal pour accéder, 4 mètres plus haut, aux drainages des réservoirs.
Ce qui impressionne ensuite, c’est la robustesse de sa construction. La taille de ses gros rivets et l’épaisseur de ses tôles donnent à penser qu’il est construit comme un « cuirassé ». Quand on monte à bord, la similitude avec un bateau est encore plus réelle et l’on est tenté de lancer un « Permission de monter à bord? ».
Le cockpit est assez spacieux mais spartiate. Une grosse barre relie les deux volants de commandes de vol. Ce qui permet une autre allusion à la marine : “dans un Catalina, on ne tient pas le manche, on tient la barre, et on n’est pas aux commandes, on est à la manœuvre !"
Typique des hydravions ailes hautes : les commandes des moteurs sont accrochées au plafond. Démarrer un gros moteur en étoile reste un plaisant cérémonial, mais le Pratt & Whitney « Twin Wasp » n’est pas un moteur capricieux, on maîtrise son démarrage rapidement.
Le roulage au sol est aisé, et le freinage différentiel est efficace, ce qui permet d’être à l’aise même sur des tarmacs congestionnés.

Dans les airs :

Vu le poids de la bête, on se met à craindre pour les performances au décollage. Mais les deux moteurs Pratt sont là, puissants et fiables, comme de bons vieux chevaux de trait ardennais, on peut toujours compter sur eux pour tirer.
La longueur du décollage est finalement raisonnable. Et l’on est beaucoup moins ému par la longueur de piste nécessaire que par les obstacles pendant la montée initiale car le taux de montée, lui, reste très modeste.
En vol, surtout en démonstration, les actions sur les commandes sont très viriles et amples. Ce n’est pas un avion pour jeunes demoiselles timides.
On ne peut pas dire que les commandes soient très harmonieuses. Les efforts sur le palonnier sont légers tandis que les commandes d’ailerons sont particulièrement lourdes. Ainsi, au début, le défi de faire des virages coordonnés est rendu très amusant, d’autant qu’il a une nette propension au lacet inverse et au roulis induit. Mais on s’y habitue facilement et après une longue séance d’ajustement sur les trois axes, son pilotage devient rapidement confortable. Le maintien du cap est alors aisé, la visibilité depuis le cockpit est très bonne et la navigation à vue devient un régal. J’aime à dire qu’il devient alors "délicieusement paresseux".
C’est en croisière que les qualités du Catalina s’expriment véritablement. Il n’est certes pas rapide, mais il est taillé pour la route, c’est un navire au long cours. Une de ses plus importantes caractéristiques est la capacité énorme de ses réservoirs d’ailes qui lui donne une incroyable autonomie de plus de 16 heures de vol non-stop !
Pendant l’approche, il faut tenir compte de son inertie, et de l’anticipation nécessaire qui en découle, mais l’atterrissage est globalement facile à gérer.

Et sur l’eau :

Un bon amerrissage est avant tout une question d’attitude et de vitesse. Quand l’approche est très rigoureusement stable, l’amerrissage est très doux. Mais à grande vitesse sur l’eau, il faut rester très vigilant, car un début d’instabilité en tangage peut se transformer rapidement en catastrophe. A basse vitesse sur l’eau, les manœuvres sont très fastidieuses, et c’est là qu’un bon travail en équipage prend toute son importance.
En résumé, le Catalina n’est pas un avion difficile pour des pilotes  habitués à gérer des aéronefs lourds.  Solide, robuste et fiable, le PBY accomplit efficacement les tâches pour lesquelles il a été conçu.
Etre « à la manœuvre » sur le PBY Catalina N9767 n'est pas qu’un grand plaisir de pilotage, c’est aussi un immense privilège, car celui là en particulier est bien plus qu’un simple avion de collection, c’est un monument historique volant !

Yves Cartilier"

 

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